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Le GUYANE

(Toulon)

Récit...

"  Début mars 2012... une plongée difficile et "engagée", 108m de fond, froid, houle et fort courant... mais qui nous a permis de découvrir cette épave majestueuse dans son linceul de gorgones et d'Anthias"

[15/03/2012]
 
Le GUYANE à  flot, avant ses "aventures" italiennes et allemandes... La vidéo de cette plongée coté bulles, signée Marc Langleur
                                                                                                         
 
 

 

 

 

 

*Pour ceux qui ne maîtrisent pas tout fait le jargon des plongeurs recycleurs un "petit lexique" se trouve au bas de cette page*  

 

 

Un brin d'Histoire:

Le GUYANE est un cargo frigorifique de 96m de long. Il fût lancé en 1934. Il assure le transport de fret entre la Martinique et la métropole. En 1943 il est réquisitionné par les italiens et rebaptisé "Acqui".  Mais les alliés débarquent en Italie. C'est alors que le navire est sabordé afin de ne pas tomber entre les mains des alliés. Les allemands en prennent alors possession, le renfloue, le réarmé pour le transformer en mouilleur de mines. Il prend alors le nom de "NIEDRSACHSEN". Il sera affecté en Méditerranée afin de tenter d'empêcher un débarquement alliés en Provence.
En février 1944, il quitte la rade de Toulon avec une cargaison de mines et 2 navires d'escortes. Mais le sous-marin Anglais UPSTART veille et tire plusieurs torpilles, dont une va toucher le Niedersachsen par tribord avant. Il coule rapidement faisant 12 victimes. Il repose désormais, presque à plat sur un fond de 110m au large de Toulon...
 

                                                   

                            "C'est par une agréable matinée de mars 2012,  que nous nous retrouvons Alex, Marc, Laurent et moi au port de la Madrague, devant le club de Jo Galien, AZUR-PLONGEE à St Cyr sur Mer.  Nous sommes accueillis chaleureusement par Véro, Jean-Marie et Manu. Après une brève présentation Manu nous interroge sur nos besoins, nos objectifs et nous repassons en revue les procédures de sécu, le matos et le déroulement de la plongée... Tout est callé, il est temps de préparer le matos.

Alex et moi sommes en binôme en eCCR (même recycleurs, même config), alors que Marc et Laurent, en OC, plongeront ensemble... Marc avec un bi 20 et Laurent avec un bi 18! Quand on voit nos "petites machines" à côté de ces encombrants bi, Alex et moi ne regrettons pas, ce temps révolu, où nous aussi faisions ce genre de plongées en "ouvert"!!! Après un petit contre temps (erreur de gonflage pour Laurent) re-gonflage, chargement de tout le matériel, nous voilà parti.

 




                                    Dès que l'on sort du port une petite houle nous accueille. Pas bien haute (50 à 60cm) mais assez longue. Pas de vent. Le gros semi-rigide déchire la surface lisse de la Grande Bleue. Au bout d'une heure de navigation nous sommes sur zone. Jean-Marie et Manu font plusieurs passages afin d'être certain qu'ils nous largueront bien sur l'épave. Le sondeur montre un bel écho... la gueuse de 160m, lestée de 30kg est larguée et coule à pic... Le bout se tend et la bouée dérive un peu. C'est qu'il y a un peu de courant! Et, vite, le bout devient oblique annonçant une descente un peu plus longue que prévue.

Nous aidons Marc et Laurent à "s'enfiler" dans les harnais qui supportent leur impressionnants bi 20 et 18... On leur clampe les 3 S80 de déco... et ils sont largués sur la bouée. A notre tour de nous glisser dans nos machines, Manu me prête la main pour accrocher le cernier BO, tandis que Jean-Marie nous ramène près de la bouée. GO! Avec les scoots, les phares, l'appareil photo d'Alex, les flashes et les BO... il nous faut quelques secondes pour remettre tout ce bazar en ordre et commencer la descente...
Données techniques de la plongée:

Temps fond, Run Time...

-Profondeur du fond 108m
- Point haut de l'épave: 89m
- Temps fond: 23'
- Set Point fond: 1.3

- DTR: 90'
- Temps total: 115'


Plongeurs, recycleurs, gaz...

- Alexandre Fox:
 APDiving Evolution+ ; Diluant Tx 9/60; Propulseur SUEX ZEUXO ADV 14

-
Franck Gentili:
APDiving Evolution+ ; Diluant Tx 9/60; Propulseur SUEX ZEUXO ADV 14

Marc Langleur et Laurent Cruchaudet en OC


Gaz de secours (Bail Out):

-
Alex  : 3BO 6,8l carbone 300b: 10/70; 21/35; 50%
- Franck: 3BO 6,8l carbone 300b: 10/70; 35/30; 50%

- Une S80 + une Luxfer 7l d'O² pur laissées sur le bateau prêtes à être largué sur les plongeurs en cas de sortie de parachute jaune.
- Les BO de 35/30, de 21/30 et de 50% sont mutualisés. Nous avions chacun un BO fond 10/70 qui nous permettait de rester un peu au fond, afin de retrouver le bout par exemple, puis les autres BO sont mutualisés afin de nous permettre de "sortir" sans aide extérieure si un seul d'entre nous avait du remonter sur BO.


Sécu surface:
- Semi-rigide manœuvrant avec un DP plongeur hCCR expérimenté, Tx et 2éme degré  à bord: Manu Shuller
- Blocs d'O² (un pour chacun des plongeurs), équipés de détendeurs et de direct-système, à bord du bateau de sécu et prêts à être largués si un plongeur avait envoyé son parachute jaune.
- Une ligne de décompression immergée avec 20/30; 50% et O²
- Une ligne de déco largable avec les même gaz

Organisation, structure:
AZUR PLONGEE: St Cyr sur Mer

Eclairage: Tilytec TT3 + 4500 (INNODIVE)
Une des tourelles de l'épave: Photo Alex Fox
 
                                   Le bout est pratiquement à 45° et le courant tire plus fort que nous ne le pensions... Nous commençons la descente... Bubble-check, Ok... Alex, comme d'habitude, "gueuse" à fond et disparait le long du bout. Quand à moi, le leach du scoot s'est pris dans les flashes esclaves, et m'oblige à faire une halte afin de dépêtrer tout ça...  Je suis  à 20m et le courant m'entraîne... Mon scoot est enfin libre, mais je distingue à peine le bout. J'allume le scoot et descend en diagonale pour rejoindre Alex. Il me faudra prêt de 5', depuis l'immersion, pour arriver sur l'épave. Alex m'attend patiemment. Derniers checks: manos, changement de set point, ordi back-up... c'est parti...

La gueuse est tombé en plein dans le mille, et bien au fond de l'épave à mi-chemin entre la proue et le château... Vu le jus, la récupérer ne sera pas facile... Bref, Alex est déjà en train de mitrailler. Vite, il faut que j'oriente correctement les flashes esclaves et la cellule. La visi ne me semble pas top, puis il y a ce courant, il faut absolument que la remontée ce fasse au bout... punaise, 100' de remontée dans ces conditions ça va être coton! Déjà que je ne transpire pas, j'appréhende le froid à endurer pendant toute la remontée, accroché à un bout dans le bleu et le courant... En plus je suis déçu par la visi: moi qui rêvais de faire l'épave de long en large à fond de scoot... Je ne suis un poil déçu, un peu préoccupé, un "chouilla dans l'gaz quoi"! Alex me sors de ma cogitation et me demande par où on va... ça fait quelques minutes que l'on traîne autour de la tourelle. Les gorgones éclatent de milles feux rouges et jaunes sous les phares et les flashes. Je me ressaisi et enclenche le scoot direction l'arrière du Guyane


             

Les calles du GUYANE: Photo Alex FOX
                           En quelques secondes nous voilà sur le château, lui aussi couvert de magnifiques gorgones. On est à 93m et après le château on distingue à peine le pont 6 ou 7 mètres plus bas. Sombre, laiteux et un peu glauque. Je regarde Alex, et je fais de mon mieux pour orienter les flashes esclaves et présenter la cellule qui les commande, face à ses flashes à lui. Il shoote, à chaque explosion de flash c'est une explosion de couleurs, les anthias roses en banc serré, le rouge et le jaune vif des gorgone... c'est féérique, et le contraste avec l'obscurité ambiante est saisissant. A tel point que je préfère rester à cette profondeur et retourner vers la proue plutôt que de descendre sur le pont. Je fais demi tour. Alex me fait un signe, genre "tu vas où?". Je lui répond par là en lui désignant l'avant... On enclenche les scoots, le courant latéral est fort... On repasse devant le bout de la gueuse et on pousse jusqu'à la proue.

Il faut prendre un peu de distance pour arriver à en discerner la forme de la proue, tant elle est couverte de gorgones. Les anthias lui tournent autour par centaines. Là, il y a de belles images à  faire. Je cherche Alex du regard et positionne les flashes esclaves: ça crépite, les couleurs jaillissent, c'est dans la boite!

Le temps passe, j'ai toujours un coin de cerveau qui me répète "tu vas te cailler"... j'en frissonne d'avance! On presse la gâchette des scoots et on repart vers l'arrière. On dépasse la proue, on devine une partie du gaillard avant en contre bas, puis retour sur  la tourelle avec sa pièce d'artillerie pointée vers la lumière. La gueuse... on poursuit, retour sur les restes du château, je pique vers le pont. Alex a pris un peu d'avance et a contourné le château délabré par l'autre côté. Il est à l'affût, tel le chasseur à l'agachon. Le chasseur d'image... en photographe d'expérience, il a flairer le beau cliché! Je survole les immenses trappes de cales juste après avoir passé le château, j'ai juste le temps d'orienter les flashes, Alex a déjà le masque dans le viseur de son caisson : "flash", "flash"...  Je le rejoins, il est temps de retrouver la gueuse pour "grimper" lentement vers la surface. Nouveau coup de scoot, on retrouve vite le flasheur qu'Alex a installé sur le bout en m'attendant à la descente. Coup d'œil sur l'ordi, 22'30"... on décolle.

La remontée sera pour moi longue, interminable... Dès les 40m j'ai violemment ressenti le froid et passé les 60 dernières minutes de la déco à grelotter. De plus la houle avait forcé en surface, et vu le courant, il était impossible de lâcher le bout... On s'est fait sérieusement balloter. Dès que je le pouvais j'injectais de l'O² dans ma boucle afin de maintenir la PPO² la plus haute possible: un peu agressif comme déco, mais vu comment j'avais froid, fallait que ça dure le moins longtemps possible.

Bref, 120' après avoir entamé notre descente nous voilà en surface, des couleurs des gorgones et des anthias plein la tête. Manu et Jean-Marie nous récupèrent. La gueuse, quant a elle, restera prisonnière du GUYANE, impossible d'extraire le lest des tôles...
 Franck Gentili




Consommation des gaz:

-
: 70b dans un bloc de 2 litres soit 140 litres
-
Diluant Trimix 9/60: 70b dans un bloc de 2 litres soit 140 litres
-
Air pour combi étanche et wing: 50b dans un bloc de 2 litres soit 100 litres





La proue du GUYANE: Photo Alex Fox
                       

                                                                                                                                                                                                                                                                           

 
   
Liens:

- Le site d'Alex Fox: photo-tek-plongee.com
- Azur-Plongée: azurplongee.com
- Sources Historiques: helioxplongee.fr
- Bulles de Rêve: bulles-de-reve.jimdo.com
Beaucoup d'autres photos du GUYANE et de cette plongée sur le site d'Alex FOX:
photo-tek-plongee.com
   
Remerciements:

- Alex Fox pour ses superbes photos
- Azur Plongée à St Cyr sur Mer pour la logistique
- Bulles de Rêve pour l'organisation
 
   © EPAVES-PASSION.COM, mars 2012
 
Nom épave Lieu Type GPS Profondeur max
GUYANE ( Niedersachsen) Toulon Ancien cargo armé   110m
 


 

  *Petit Lexique "recycleux":

En relisant ce qui précède je me suis aperçu que beaucoup de termes propres au jargon des utilisateurs de recycleurs avaient été utilisés. Or, en aucun cas je ne souhaite que l'accès à cette page ne soit "réservé" aux seules personnes familières de l'utilisation d'un recycleur à circuit fermé... D'où l'idée d'essayer de traduire en termes simples, que j'espère compréhensibles du plus grand nombre, " l'argot obscur" des "recycleux".

- Recycleur: "Machine diabolique" qui permet de plonger plus longtemps en recyclant les gaz respirés par le plongeur. Ceux-ci sont épurés du CO² produit par le plongeur et enrichis d'O² avant d'être à nouveau respirés par le plongeur. Ils peuvent être à gestion manuelle quant à l'injection d'O² dans ce cas on parle de mCCR ou à gestion électronique là on parle de eCCR (CCR= Close Circuit Rebreather)
- Bail Out ou BO: Bouteille de plongée entre 6 et 12 litres, équipée d'un détendeur et embarquée par le plongeur recycleur, afin de pouvoir y respirer dessus en cas de défaillance du recycleur
- Check: Ensemble des vérifications OBLIGATOIRES permettant de valider le bon fonctionnement du recycleur avant et pendant la plongée.
- Chaux ou  chaux sodée: Granules de "Sofnolime" conditionnés par le plongeur recycleur dans un compartiment du recycleur appelé canister afin de constituer un filtre. Les gaz respirés traversent ce filtre afin de les épurer de son CO² par réaction chimique. Le CO² est en fait "fixé" par le filtre. La chaux nécessite d'être "démarrée" par quelques minutes de respiration dans le recycleur en surface afin d'être pleinement efficace en immersion.
- Bubble check: Vers 6 m de profondeurs, les plongeurs recycleurs s'arrêtent et vérifient mutuellement l'étanchéité du recycleur de leur binôme en traquant d'éventuelles bulles s'échappant de la machine et qui signifieraient une fuite dangereuse dans la boucle respiratoire.
- PPO²: Quantité d'Oxygène contenue dans les gaz respirés par le plongeurs recycleur. Pour être "viable" celle-ci doit être entre 0.16 et 1.6 b.
- Set Point ou SP: Réglage de la valeur de la PPO² que les recycleurs à gestion électronique doivent maintenir de façon automatique mais sous la surveillance du plongeur recycleur. Un Set Point bas, généralement 0.7b de PPO², est utilisé entre la surface et le fond; un Set Point haut , généralement 1.3b de PPO², est utilisé au fond ou à la remontée
- Diluant et O²: Un recycleur à circuit fermé fonctionne avec 2 petites bouteilles de gaz de 2 ou 3 litres. Une contient de l'oxygène pur l'autre un diluant dont la composition peut varier en fonction du type de plongée. Comme son nom l'indique le diluant sert à "diluer" l'oxygène contenu dans les gaz respirés afin de permettre que ceux-ci ne soit pas toxique en profondeur. Par exemple, un recycleur à circuit fermé à oxygène pur (donc sans diluant) ne peut être utilisé plus profond que 6m.
- Afficheur: Ecran relié au recycleur, porté généralement au poignet ou en console, et qui informe le plongeur des paramètres de la plongée mais aussi et surtout du bon fonctionnement du recycleur. L'une des informations les plus importantes affichée indique au plongeur la quantité d'O² contenue dans son mélange respiratoire (PPO²)
- Embout  ou DSV: Partie du recycleur tenu en bouche par le plongeur, c'est par là qu'il respire les gaz de son recycleur.
- BOV: Acronyme anglais: "Bail Out Valve": Embout respiratoire du recycleur sur lequel est greffé un deuxième étage de détendeur et qui est relié à une bouteille embarquée par le plongeur. La BOV permet au plongeur recycleur, en une fraction de seconde, de ne plus respirer le mélange de son recycleur mais celui de la bouteille reliée à la BOV et ce sans retirer son embout de la bouche.
- Boucle: ensemble de tuyaux, de sacs... dans lesquels circulent, en boucle, les gaz respirés par le plongeur recycleur: poumons du plongeurs, tuyaux, embout, faux poumons, filtres...
- ADV: Acronyme anglais; "Auto Diluant Valve": Permet l'injection automatique de Diluant dans la boucle respiratoire du recycleur à la descente.
- Cellules: Ce sont des sortes de "piles" qui contiennent des composés chimiques. Plus elles sont placées dans une atmosphère riche en O², plus elle vont délivrer de courant. La lecture du voltage des cellules, après traitement électronique, indique au plongeur recycleur en quasi temps réel la teneur en Oxygène des gaz qu'il respire. Ces cellules, en contact direct des gaz de la boucle, doivent être étalonnées avant de plonger et sont entre 3 et 5 par recycleur.
- Vision: Electronique et ordinateur qui contrôlent les recycleurs APD Inspiration Vision et Evolution
- Vitaminer la boucle
: Action consistant à injecter manuellement de l'O² dans la boucle respiratoire afin d'augmenter la valeur de la PPO² au-delà du Set Point ; permet de désaturer plus rapidement les gaz inertes respirés (Hélium et Azote) en respirant un mélange plus riche en O².
- Mode O² pur: Action qui consiste à faire 3 rinçages complets de la boucle respiratoire (en rejetant la totalité des gaz de la boucle par le nez et en la re-remplissant avec des injections manuelles d'oxygène pur), afin d'avoir un taux d'O² dans la boucle le plus proche possible des 1.6b. Ceci permet d'accélérer et d'améliorer la décompression.
 

     
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