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 Un  hydravion allemand par près de 100m de fond...

Récit: "ma première sur le Dornier 24"

                                                                            

                            [22/04/2010]

 

Un Dornier 24 à flot (cliquez pour agrandir) 

Le Dornier 24 est de conception hollandaise. Quelques exemplaires furent construits sous licence pour la Lufttwaffe juste avant la 2ème guerre mondiale. La production se poursuivit après l'invasion allemande en Hollande mais aussi en France occupée. Seuls quelques exemplaires furent mis en service.
Le Dornier 24 était un hydravion à coque tri Moteur qui fut utilisé pour la patrouille maritime, le transport, ou l'évacuation sanitaire. Ce monoplan entièrement métallique, gros et robuste, se caractérisait par une coque de faible profondeur et de large section, de même que par ses nageoires stabilisatrices


Le Dornier avec ses "couleurs d'origine"




Un brin d'histoire:

Le 1er juin 1949 le Dornier 24 décolle de St Mandrier et doit rejoindre Ajaccio. A hauteur de Port Cros les trois moteurs BMW tombent en panne et l'amerrissage d'urgence dans des conditions de mer difficile arrache un des deux flotteurs. L'appareil se retourne et coule. Le pilote est tué sur le coup alors que les 7 hommes d'équipage sont récupérés, saints et saufs, par un bateau de pêche.
L'épave ne sera retrouvé qu'en 1999... C'est très certainement grâce à la perte d'une torpille lancée au cours d'un exercice -sans doute attirée par la masse métallique du Dornier-, que la Marine , qui recherchait son projectile perdu, localisa l'épave par 98m de fond...



Vue imprenable depuis l'empennage: la carlingue et les ailes affaissée sur le cokpit
Photo: Patrice Strazzera




Le moteur central éffondré sur le cokpit
Photo: Alex FOX



Une superbe vue de face: Au 1er plan les moteurs et au fond l'empennage arrière!!!
"Cliché d'ENFER" signé Alex FOX
Visitez sont blog: alexandrefox.over-blog.com

 
Nom épave Lieu Type GPS Profondeur max
JDORNIER 24 Port Cros Hydravion 06° 24568 E / 43° 02609 N 100m
 
 

      

     "Voilà... ENFIN nous avons pu plonger sur cette épave mythique qui me faisait tant rêver... Par trois fois au cours de ces dernières années une météo peu conciliante avait fait avorter les plongées... Cette fois-ci, mi-avril 2010, Eole est avec nous. Quatre jours anticycloniques au dessus de Cavalaire... Le "camp de base" et l'organisation sont confiés à l'incontournable Arnaud Niel d'Eau Bleue (Cavalaire).

 

   Les jeudi et vendredi sont consacrés aux plongées de "réadaptation" au "trimix lourd". Nous planifions 88 et 95m sur le tombant à Charlotte. Il y a pire comme site d'entraînement!!! Tous les automatismes en config lourde sont bien présents et opérationnels: descente rapide sur le triox (travel-mix), passage sur le mélange fond, puis remontée en pleine eau depuis le fond, dévidoir + parachute, changement de gaz aux bonnes profondeurs des 3 gaz déco avec validation sur le VR3... bref, les gestes s'enchainent naturellement, Didier et moi ne sommes pas trop rouillés et sommes  prêts pour la plongée du samedi sur le DORNIER...

 

   Le Samedi c'est "tempête de ciel bleu", pas la moindre ride sur l'eau. Nous serons 7 à nous immerger sur le Dornier. 08h00 sur le quai tout le monde analyse ses gaz et gré son matos: du 14/55 en mélange fond dans mon bi 12, du 25/30 en "travel mix" dans une S80, du Nx 40 dans une seconde S80 et enfin 150b d'O² pur dans ma 7 l Luxfer... dernière vérif avant d'embarquer ma "0,8 litre Argon" est bien à 200b. Il n'y a plus qu'à rentrer ces gaz dans le VR3...Encore une fois Arnaud (dit: le "sorcier du gonflage") nous a concocté des mélanges avec une précision diabolique!!! Nous voguons donc vers  le site entre Port Crau et l"Ile du Levant où près de 100m plus bas nous attend le Dornier. 1h20 de "nav." et nous y sommes. Françoise balise l'épave et nous nous équipons. Le bout reste "pelotonné" tellement l'absence de courant est criante. Pas une ride sur l'eau... ça se présente bien...

 

 

   Nos 3 compères de "Bulles de Rêves" (Marco, Jean et Rémi) se jettent à l'eau en premier, puis se sera notre tour (Didier et moi), enfin Rémi et Alex fermeront la marche. L'eau est cristalline et nous glissons rapidement le long du bout.  Vers 40m j'abandonne mon triox 25/30 pour basculer sur le mélange fond (14/55) tout en continuant la descente; je valide le changement de gaz sur le VR3... "ah oui... ne pas oublier de passer les oreilles (ça m'a joué des tours en octobre dernier sur une 110m)". Descendre, valider le gaz sur l'ordi, tenir le bout, changer de gaz, refermer la S80 de 25/30, passer les oreilles... Je vais avoir besoin d'une main supplémentaire... Finalement tout se déroule nickel. Vers 60m une ombre prometteuse se dessine quelques 40 m plus bas. Je glisse jusqu'au sable car je dois "percuter" un des deux parachutes de gueuse. Le nez dans le sable, une giclette de 14/55 dans le gosier du parachute... Pas trop quand même juste de quoi décoller la chaine, Alex et Rémi percuteront le second parachute à la fin de leur descente. Coup d'œil sur l'ordi: 98.2m,  tps3'... ouverture et fermeture des 3 blocs déco, tout est OK on va pouvoir y aller...

 

 

   Je relève la tête du sable et de mes instruments, Didier m'attend stabilisé quelques mètres au dessus et me désigne du doigt une direction... Mes yeux commencent à s'habituer à  l'obscurité et là... le spectacle est hallucinant... Nous sommes à quelques mètres derrière l'immense queue à double empennage de l'hydravion....Elle surplombe le sable de quelques mètres, et dans la relative obscurité due à la profondeur, elle se détache nettement sur la clarté de la surface. Un petit coup de gaz dans la wing et nous voilà stabilisés au dessus de la queue de l'appareil. La visi est incroyable et de là on peut distinguer nettement l'épave dans son entier: les ailes, les 3 moteurs et l'avant... Les mâts qui soutenaient l'ensemble ailes/moteurs se sont brisés lors de l'impact. Les ailes reposent sur le cockpit et en interdisent l'accès. Elles sont cassées derrière le moteur central dans l'axe de la carlingue et leurs extrémités reposent sur le sable clair de part et d'autre de l'appareil.

 

  

Didier et moi poursuivons notre progression vers l'avant; au passage je remarque une grande trappe large et ouverte, sur bâbord, qui nous laisse entrevoir les entrailles du Dornier... Une grosse mostelle veille et un énorme congre qui s'était aventuré à l'extérieur va se mettre à l'abri dans la carlingue à notre passage... La progression se poursuit: survol des ailes (27m d'envergure) les trois moteurs en bon état avec toutes leurs pales et enfin le nez de l'appareil  avec les bribes de la bulle de mitraillage avant. Un bref OK à Didier et un regard furtif sur mon VR3: Pfd 96.8m, temps 7', TTS (time to surface) 47'... Sur le sable devant l'appareil repose une grosse torpille. En fait, elle a été tirée en exercice par la marine bien après le naufrage du Dornier, elle a certainement été attirée par la carcasse métallique, et, est venu se planter dans le sable juste sous le nez de l'hydravion. La marine en recherchant sa torpille perdue a découvert le Dornier!!!

 

 

   Demi-tour vers l'arrière et je décide de faire une halte pour passer la tête et le phare dans la trappe aperçue à l'aller. Elle est assez grande pour qu'un plongeur s'y glisse, mais avec 6 blocs et par 98m se ne serait pas raisonnable surtout à moins de 4' de l'heure prévue pour décoller du fond. Je me contente donc, à regret, de passer la tête dedans pour en éclairer l'intérieur. Notre ami le congre est là tel un gentil "chien-chien" de garde., Il ne fuit pas et pose sous le faisceau de mon phare. Il sait d'expérience que les plongeurs ne le dérangent pas longtemps en général et que, dans quelques minutes, le lieu retrouvera toute sa quiétude. Je passe pardessus la carlingue pour passer côté tribord, là un grappin et 90m de bout légèrement concrétionnés forme un méli-mélo qu'il vaut mieux contourner... Enfin retour sur la queue... Je coupe mon phare regarde Didier qui me fait signe qu'il faut y aller... Le VR3: 90,2m, temps de plongée 13', TTS (time to surface) 79'... On est exactement dans les temps que nous avions planifiés et effectivement il est temps de remonter...

 

 

   OK... Maintenant fini le divertissement, la partie la plus critique de la plongée commence... Si je ne veux pas que le VR3 me rajoute des minutes de paliers supplémentaires il faut se concentrer sur la vitesse de remontée. Je fixe le "barre graph" de la vitesse et j'entame la remontée en pleine eau. Premier stop de 2' vers 80m: Je décroche mon parachute, l'accroche au dévidoir et l'expédie vers la surface... c'est bon, j'ai pas trainé et suis resté bien stable à 80m... Didier galère avec son dévidoir, cette fois c'est l'axe qui le lâche et coule vers le fond. Je l'entends qui "roumègue" dans son détendeur... Je suis mort de rire... (c'est  juste le 4éme dévidoir qu'il "carbonise" en  3 plongées, il a dû être "marabouté"... c'est définitivement la seule explication rationnelle!!!) J'aperçois Rémi et Alex qui poursuivent leur explo, le flash d'Alex crépite. Vu la visi, il devrait sortir de belles images!!!

 

 

   Les paliers s'enchainent, de plus en plus longs. Vers 60m réouverture de la S80 de 25/30 utilisée pour la descente, en vue d'un premier changement de gaz à 54m "pétante"... sans interrompre la remontée, validation du changement de gaz sur le VR3... c'est bon, tout "gaze"... Vers 35m je me prépare à passer sur la S80 de Nitrox 40, à 30m je change de gaz et je valide la manip sur l'ordi... Je profite du palier suivant pour refermer le bloc de 25/30, décrocher la S80 et la clamper par le col, à ma taille, elle flotte ainsi dans mon dos, restant accessible. Cela me permet de regagner un peu de mobilité pour mon épaule gauche... Les stops se succèdent et à 6m passage sur le dernier gaz (l'O² pur) pour les 45 dernières minutes. L'eau est à 14° mais ça va, bien couvert c'est supportable. J'ai déjà utilisé 3 ou 4 fois ma purge pipi au cours de la remontée... Didier est là, et bataille toujours avec son dévidoir "en kit". Je prends appui sur mon dévidoir et me repasse dans la tête le film de cette extraordinaire plongée... Pour passer le temps je joue avec une petite méduse.. puis enfin l'ordi affiche la fin du palier de 4.5m et TTS 1'!!! ça fait 91' que nous barbotons, encore une grosse minute pour percer la surface et voilà Arnaud qui arrive avec le bateau pour nous récupérer. Du haut de son poste de pilotage il nous demande si tout est OK, nous lui répondons par le signe conventionnel et de large sourire que nos détendeurs O² ne parviennent pas à masquer...

 

 

  

Alex et Rémi ont une déco avec un peu moins de conservatisme, et viennent d'être récupérés. Nous grimpons à bord puis on récupère les avignonnais.  Bien que partis avant nous, ils sortent de l'eau 10' après. En fait ils ont un peu "traîné" au fond...et avait planifié une déco un peu plus longue... rien de bien grave...On remet ça quand?"

Franck Gentili     

 

 

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